Les remboursements Sécu
Oui, mais l’inflation, l’augmentation des charges sociales, les nouvelles nécessités d’asepsie (notamment Sida) et la sophistication des équipements ont fait exploser les coûts… sans que la Sécu n’accepte d’augmenter ses remboursements… d’où la pression des dentistes pour sortir des prix plafonnés. La Sécu a réagi en acceptant de déplafonner, mais seulement les prix des couronnes, toujours remboursée sur la base de l’ancien prix plafonné. Les actes plafonnés – remboursés (radios, détartrage, extraction, dévitalisation, plombage…) sont dits « opposables » ou encore nommés par les dentistes « soins » dans leur langage courant. Puis, au fur et à mesure des innovations techniques (implants, facettes, laser…) a accepté que les dentistes appliquent des prix libres, sans plafonnement, mais sans remboursement (actes dits « hors nomenclature »).
Rappelons que le prix de ces actes n’a pas été revalorisé depuis les années 70 et que le dentiste est « perdant » financièrement en les pratiquant. Une fois les « soins » terminés, le dentiste proposera donc une couronne (dans la plupart des cas, nous avons besoin de plus d’une couronne – voir approche globale). Certains patients acceptent de faire cette couronne… Le prix de cette couronne comprendra donc 1) le cout du prothésiste 2) le temps du dentiste pour réaliser cette couronne et 3} le temps que le dentiste a « perdu » dans votre bouche pendant les soins. Pourquoi pas, c’est de bonne guerre puisque le dentiste n’a pas choisi de plafonner les remboursements. Mais là où les prix deviennent délirants et échappent à tout «tact et mesure» comme le recommande le Code de déontologie des Chirurgiens dentistes, c’est que le prix de VOTRE couronne devra aussi comprendre 4) le temps que le dentiste a « perdu » en réalisant les «soins» dans la bouche des patients qui ont REFUSÉ la couronne ! Ainsi, plus le cabinet compte de patients qui refusent les couronnes, plus le prix de la couronne de ceux qui acceptent sera élevé. Plus ce prix est élevé, plus les patients refusent de devis de couronnes et… plus les prix s’élèvent… et ainsi de suite jusqu’à l’absurde : un bridge qui demande 2 heures de travail sera facturé 2 000 € alors qu’en 2 heures, le dentiste facturera par ailleurs 4 détartrages à 28,92 soit 115,68 €. Cette mécanique absurde d’augmentation des prix n’est possible que dans un contexte de monopole (voir numerus clausus plus haut)… Sans concurrence, les dentistes imposent leur logique à toute la population, en prenant leur détresse en otage. Les implants ne font que suivre cette logique infernale, mais avec un effet multiplicateur. En effet, l’implantologie n’étant pas enseignée en faculté (voir plus haut «formation»), elle est déléguée à des «spécialistes» qui, encore plus rares que les dentistes «généralistes» imposent leur prix sans tact et sans mesure.
Mais il existe une autre solution qui ne suppose pas de collaboration de l’État ou de la collectivité : l’amélioration de la productivité des dentistes, qui est une des plus faibles du monde (2,5 fois moins que les allemands, 5 fois moins que les américains). Ainsi, en doublant le volume d’actes réalisé en un temps donné (sans en réduire la qualité bien sûr), le dentiste pourrait ainsi diviser ses prix par deux, sans renoncer à ses revenus et sans travailler plus heures. Des cabinets de consultants spécialisés en dentaire existent dans le monde entier. Le leader français est animé par un dentiste qui intervient dans toutes les grandes conférences dentaires françaises. Il faut donc en conclure que les dentistes français se forment en nombre à l’organisation (qui leur promet en général de doubler leur productivité – à qualité égale, voire supérieure), mais en profitent pour doubler leur profit plutôt que diviser leurs prix par deux. Pourtant, ces méthodes d’organisation rationnelles du travail se basent sur des principes qui ne portent aucunement atteinte aux soins médicaux en eux mêmes, mais sur la logistique. Ainsi, la présence de 2 assistantes par dentistes, au lieu de 0,33 en moyenne (voir plus haut «assistance») libère le dentiste de maintes tâches non médicales, lui permettant ainsi de se concentrer sur des actes que seul lui sait faire. Certains centres dentaires associatifs proposent de faire bénéficier aux patients de ces gains de productivité (en divisant leur prix par deux) font l’objet d’une campagne de dénigrement organisée par les syndicats dans la presse, les libéraux sur les forums internet, l’Ordre des Dentistes dans les tribunaux. Ces centres orientés vers l’intérêt du patient font même perdre le contrôle de ses nerfs au Président du Conseil de l’Ordre des Dentistes, tant le sujet est «délicat». Les efforts de la profession pour protéger la rente des dentistes libéraux est à la mesure du pactole qu’ils protègent : 10 milliards d’euros que se partagent 32 000 professionnels organisés en monopole. La réorganisation de la profession est pourtant le seul scénario réaliste. En effet, une augmentation du remboursement Sécu n’est économiquement pas envisageable (voir plus haut : «négociations stériles». |
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